Jeûne intermittent : les femmes peuvent elles le pratiquer ?

Le jeûne intermittent on en entend beaucoup parler, mais on entend aussi tout et son contraire. Certains disent qu’il ne faut pas sauter de repas, d’autres disent qu’au contraire c’est bon pour la santé. On peut aussi entendre que ce n’est pas bon de sauter de le petit déjeuner. Ou encore que les femmes ne devraient pas pratiquer le jeune intermittent. Je vais ici faire le tour de la question et vous donner mon avis sur le jeûne intermittent

Définition du jeûne intermittent

Le jeûne intermittent, ou fasting, ou alimentation limitée dans le temps, c’est choisir consciemment et de façon structurée de faire ses repas pendant une plage horaire définie.  Par exemple dans un jeûne 14/10, on choisit de prendre ses repas sur une amplitude de 10h (de 8h à 18h), puis de jeûner pendant 14h (de 18h à 8h). Pendant le jeûne, on peut continuer à boire de l’eau, des infusions, du café ou du thé non sucré. Le jeûne est quelque chose de tout à fait naturel dans le règne animal où la nourriture n’est pas disponible à volonté à n’importe quel moment. L’Homme lui même n’a accès à cette abondance alimentaire que depuis moins de 100 ans. Nous sommes donc physiologiquement adaptés pour supporter ces périodes de jeûne.

Les différentes formes de jeûne intermittent

  • L’alimentation limitée dans le temps : 12/12, 14/10, 16/8, 18/6, 20/4
  • Le jeûne de 24h : 1 fois par semaine ou tous les 10-15j. Selon la littérature scientifique ces 2 premières options sont les plus bénéfiques pour la santé et n’ont pas d’effets secondaires majeurs sur le long terme. Mais je vais y revenir juste après et moduler un peu cette réponse en ce qui concerne les femmes
  • OMAD : 1 seul repas par jour (one meal a day)
  • Manger 1 jour sur 2
  • 5/2 : manger normalement la semaine et 1 repas par jour le week end (pas facile pour la vie sociale)

 

L’impact positif du jeûne intermittent sur la santé

  • En quelques semaines il diminue les graisses corporelles, notamment au niveau abdominal et viscéral. Et la graisse viscérale est un facteur de risque en terme de santé.
  • Il normalise la sécrétion d’insuline et améliore la résistance à l’insuline. Cela permet de maintenir une glycémie (le taux de sucre dans le sang) favorable à la santé.
  • Il réduit l’inflammation qui peut conduire à nombre de maladies chroniques : maladies cardio-vasculaires, hypertension, problèmes articulaires, maladies auto-immunes, cancers, Alzheimer, Parkinson…
  • Il améliore le fonctionnement cérébral, la mémoire spaciale, la mémoire associative et réduit la neuro-inflammation.
  • Un meilleur fonctionnement du cerveau génère un meilleur équilibre hormonal (tout part de notre cerveau)
  • Il réduit les dommages causés par les radicaux libres, ce qui a un effet anti-vieillissement et améliore la régénération cellulaire
  • Il favorise la transformation de la graisse blanche, qui a une énorme capacité de stockage, en graisse brune, utilisée pour produire de la chaleur quand on est exposé au froid, et que l’on peut donc plus facilement brûler. S’exposer au froid régulièrement est donc un excellent moyen de convertir notre graisse blanche en graisse brune et de la brûler ! Voici donc 3 bonnes raisons de sortir de chez vous en hiver, pour vous exposer à la lumière naturelle (meilleur sommeil), pour vous aérer (nos intérieurs sont plus pollués que l’extérieur) et pour vous exposer au froid !
  • Il stimule l’autophagie qui est un processus très important pour notre corps. Il élimine les composants endommagés de l’ADN, les vieilles mitochondries oxydées et tout autre composant cellulaire qui n’est plus performant. L’autophagie est un processus essentiel pour prévenir le cancer, pour ralentir le vieillissement, de défense contre les pathogènes. Pour cela il faut jeûner au moins 15 ou 16h.
  • Il est bénéfique pour le microbiote et la barrière intestinale en favorisant le développement des bonnes bactéries qui favorisent la santé métabolique

 

Jeûne intermittent, métabolisme et hormones

Le jeûne intermittent améliore donc de nombreux paramètres de la santé, de la longévité, des performances physiques et intellectuelles MAIS… oui, il y à un mais… Il peut aussi, dans certains cas, générer un stress pour l’organisme. Et selon le contexte, ce stress peut être bénéfique ou au contraire devenir négatif. Je m’explique : il va falloir prendre en compte votre niveau de santé initial, votre niveau de stress, vos capacités adaptatives et votre sexe. Et juste après je vais expliquer les spécificités chez la femme.

Le cortisol

C’est l’hormone du stress. Il aide à faire face au stress généré par notre quotidien, la charge mentale, les dangers rééls comme les dangers perçus (cette prise de parole devant votre hiérarchie par exemple), les difficultés familiales, vivre à 100 à l’heure… Mais le stress peut aussi être physiologique, c’est à dire provoqué par le café, un excès de sucre, d’alcool, la pollution, l’activité physique excessive, le manque de sommeil. Le cortisol aide à faire face à tout çà, mais son excès ou sa carence peuvent poser problème. Il se trouve que le jeûne intermittent peut aussi augmenter le niveau de cortisol. Ce n’est pas problématique si celui-ci est normal au départ, mais çà le devient chez des personnes qui ont déjà un niveau élevé en raison de multiples facteurs de stress cités juste avant. Et en plus des niveaux de cortisol constamment élevés vont perturber les hormones thyroïdiennes.

La thyroïde 

La thyroïde est le chef d’orchestre du métabolisme, et c’est elle qui va stimuler la combustion des graisses et des glucides. Le jeûne intermittent s’il n’est pas bien équilibré peut entraîner une restriction calorique, générer du stress et même des carences nutritionnelles. Tout cela va impacter la fonction thyroïdienne. Cela peut induire une chute de production de l’hormone T4, un problème de conversion de l’hormone T4 en T3 qui est l’hormone active (ce problème peut être très long à inverser une fois qu’il est survenu). Et ces perturbations sont en général plus importantes chez la femme, du fait d’un système hormonal plus complexe. Les oestrogènes notamment ont des récepteurs dans tout le corps, y compris dans le cerveau, le système digestif, les os.

Le jeûne intermittent chez la femme

Donc attention chez la femme : le jeûne intermittent de plus de 12h peut entraîner une hausse du cortisol, impacter les hormones thyroïdiennes et même réguler à la baisse les hormones sexuelles. Donc déjà si vous êtes sujette au stress, en dépression ou en burn out : attention ! Idem si vous avez un problème de thyroïde connu ou si vous avez des signes de ralentissement thyroïdien comme la frilosité, constipation, résistance à la perte de poids, fatigue dès le matin, douleurs musculaires et articulaires, yeux et visages bouffis au réveil… Certaines femmes peuvent tout à fait supporter la pratique du jeûne intermittent, d’autres témoignent de crises de boulimie, perturbations métaboliques, arrêt des règles. Alors les femmes peuvent elles pratiquer le jeûne intermittent ? eh ben çà dépend… Je disais juste avant que les oestrogènes ont des récepteurs dans tout le corps. Tout ce qui perturbe l’équilibre œstrogénique peut ainsi impacter la cognition, l’humeur, la digestion, la récupération, le métabolisme osseux, le comportement alimentaire… Un jeûne intermittent mal conduit peut perturber cet équilibre, d’autant plus s’il y à déjà perturbation du cortisol, des hormones thyroïdiennes, mais aussi au moment de la périménopause où l’équilibre entre les oestrogènes et la progestérone vacille.

Comment les femmes doivent elles pratiquer le jeûne intermittent ?

Bon alors c’est bien beau tout çà, mais on en fait quoi ? Il n’est pas impossible pour les femmes de pratiquer le jeûne intermittent, mais il faut le faire intelligemment en fonction de chaque situation : 

  • si votre corps subit déjà un stress, quelle que soit son origine (sport intensif, femme enceinte, stress psychologique, mauvais sommeil, fatigue et manque d’énergie, TCA). Dans ce cas, vous manquez de vitalité. Restez sur un modèle 12/12 et ne combinez pas jeûne intermittent avec restriction calorique. Vous pouvez tester une durée de jeûne plus longue, jusque 16/8 1 jour par semaine si vous vous sentez en forme.
  • si vous êtes en préménopause (je rappelle que la ménopause est avérée au bout de 12 mois sans menstruation, avant cela vous êtes toujours en préménopause) : testez le jeûne intermittent 12/12, jusqu’à 16/8 une fois par semaine s’il est bien toléré. Il faut maintenir les 3 repas par jour et surtout ne pas négliger les apports en protéines qui sont les briques de construction du système hormonal.
  • une fois ménopausée, l’orage hormonal étant passé, le jeûne intermittent devient moins délicat et il est possible de pratiquer du 14/10, voire même du 16/8 occasionnellement.

Les protéines étant la base de ce qui va servir à la synthèse des hormones, je ne recommande pas de sauter le petit-déjeuner, mais au contraire d’y introduire des protéines pour favoriser la synthèse des hormones dès le matin. Je conseille plutôt de commencer le jeûne le soir, il est de toute façon recommandé de manger bien avant l’heure du coucher pour favoriser le sommeil. Ainsi vous pouvez prendre votre dernier repas à 19h par exemple avant le petit déjeuner à 7h pour un 12/12, à 18h pour un 13/11, à 17h pour un 14/10, vous avez compris le principe.

Conclusion

Dans tous les cas il faut toujours y aller progressivement, être très à l’écoute de son corps et de ses sensations, et toujours ajuster sa stratégie à partir de là. Les variations cycliques sont propres à chacune. Si vous vous sentez à l’aise avec du 12/12, augmentez progressivement la durée et la fréquence du jeûne intermittent. Si au contraire vous sentez plus de fatigue, de stress, un moins bon sommeil, moins bon rapport à la nourriture, alors stoppez le, réglez les problèmes qui entament votre vitalité et réessayez. S’écouter, c’est la clé. Comme dans le sport il faut y aller progressivement. Et on n’est pas obligée de jeûner tous les jours, çà peut être 1 ou 2 fois par semaine au départ par exemple. De la même façon il n’est pas grave de jeûner 12h au lieu de 16h si on sens que c’est plus confortable comme çà. Souvenez vous aussi que le jeûne intermittent ne dispense pas d’avoir une alimentation équilibrée qui est bonne pour la santé, en terme de qualité et de quantité. Personnellement je le pratique quand je me sens dans de bonnes conditions pour le faire, c’est-à-dire quand ma journée a été relativement calme, que je n’ai pas eu d’activité physique intense et que j’ai eu une bonne nuit de sommeil.   Article écrit à partir de l’excellent livre de Christophe Carrio : « Jeûne intermittent, approche raisonnée » https://youtu.be/dLP1hVJnZmA